Une pétition, c’est ce geste citoyen qui consiste à dire noir sur blanc (et désormais en quelques clics) : “Nous ne sommes pas d’accord”. Mais pourquoi certaines pétitions parviennent jusqu’aux bancs de l’Assemblée nationale ? Est-ce un gadget démocratique ou un véritable levier politique ?
La pétition : un vieux droit remis au goût du jour
Le droit de pétition n’est pas une invention récente. Il trouve ses racines dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (article 15 : “La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration”).
En france, sous la Ve République, ce droit a été confirmé par l’ordonnance de 1958 créant l’Assemblée nationale actuelle. En clair, tout citoyen peut adresser une pétition au Parlement pour demander l’examen d’un sujet, l’abrogation d’une loi ou encore l’adoption d’un texte.
Problème : pendant longtemps, ces pétitions restaient purement symboliques. Elles étaient envoyées à la “commission des pétitions”… qui n’avait qu’un pouvoir d’archivage. Autrement dit : direction la corbeille.
L’évolution numérique : quand France Connect entre en scène
C’est avec la réforme de 2019 que le système a changé. L’Assemblée a mis en place une plateforme officielle de pétitions en ligne (petitions.assemblee-nationale.fr).
Conditions pour signer :
- avoir plus de 18 ans,
- être inscrit via France Connect (donc prouver son identité),
- et valider sa signature.
Depuis 2020, un seuil de 500 000 signatures a été fixé pour qu’une pétition puisse être examinée en commission parlementaire. En théorie, elle peut même déboucher sur un débat en séance publique si les députés le décident.
Une première historique en 2025
La pétition contre la loi Duplomb a franchi ce cap : plus de 2 millions de signatures. C’est la première fois dans l’histoire parlementaire de la Ve République qu’un texte citoyen atteint ce niveau et obtient un examen officiel en commission des affaires économiques.
Cela ne veut pas dire que la loi sera automatiquement abrogée. Mais c’est une brèche dans le système : le Parlement, obligé d’écouter la voix des citoyens organisés en ligne.
Pétition : symbole ou vrai pouvoir ?
Jusqu’ici, les pétitions servaient surtout à montrer l’opinion plus qu’à peser réellement sur le processus législatif. Mais l’exemple de 2025 crée un précédent. Désormais, on sait qu’une pétition :
- peut contraindre une commission à s’en saisir,
- peut être débattue en hémicycle,
- peut, à terme, faire pression sur le gouvernement.
En clair : la pétition n’est pas encore une arme législative, mais c’est devenu un thermomètre démocratique que les députés ne peuvent plus ignorer.
Conséquences pour la démocratie représentative
L’affaire Duplomb ouvre une question vertigineuse : si les citoyens organisés en ligne peuvent faire vaciller une loi, l’Assemblée restera-t-elle le cœur de la démocratie représentative ou deviendra-t-elle une chambre d’enregistrement de la colère populaire ?
La Ve République, qui a toujours misé sur la verticalité du pouvoir (le Président décide, le Parlement exécute), découvre une faille : le peuple peut frapper à la porte.
FAQ
Depuis quand existe le droit de pétition en France ?
Depuis 1789, confirmé sous toutes les Républiques, y compris la Ve en 1958.
Quel est le seuil pour qu’une pétition soit examinée ?
500 000 signatures, vérifiées par France Connect.
Une pétition peut-elle abroger une loi ?
Non directement. Mais elle peut contraindre les députés à se saisir du sujet et, dans certains cas, déboucher sur une abrogation.
Source :
- Assemblée nationale – Plateforme des pétitions citoyennes