Dans la grande saga de l’éducation nationale, voici le dernier rebondissement signé Élisabeth Borne. Invitée sur LCP, l’ancienne cheffe du gouvernement a livré une perle digne d’une anthologie technocratique : “Il faut se préparer très jeune, dès la maternelle, à réfléchir à la façon dont on se projette dans une formation et dans un métier de demain.”
Oui, vous avez bien entendu : l’orientation scolaire ne commence plus à 14 ans, ni à l’entrée au lycée, ni même sur Parcoursup. Non, désormais, tout se joue avant la première dent de lait tombée.
Fait notable : Madame Borne, qui n’a pas d’enfants, semble néanmoins très inspirée lorsqu’il s’agit de planifier l’avenir de ceux des autres.
L’école des vocations précoces : un projet très sérieux… et très flou
Dans cette intervention sur LCP, Élisabeth Borne évoque un “problème global de l’orientation” pour justifier sa vision. Mais au lieu de repenser un système déjà saturé, on choisit de le complexifier dès le berceau. L’idée ? Initier l’enfant à la projection professionnelle dès les ateliers pâte à modeler. Parce qu’évidemment, si Jules ne sait pas à 5 ans qu’il veut faire du droit fiscal ou de la cybersécurité, il est probablement déjà en échec.
Dans le fond, cette approche traduit un glissement idéologique majeur : l’école n’est plus l’espace de la découverte mais un marché de compétences à anticiper. Exit la curiosité, place à la rentabilité précoce. Et gare à ceux qui n’auraient pas validé leur parcours professionnel avant l’entrée en CP.
Réorientations à la carte : la rustine éducative
Heureusement, notre ancienne Première ministre nous rassure : “il faut aussi réfléchir à la façon dont on facilite les réorientations”. Une précision bienvenue dans un système où l’orientation subie est souvent la norme, notamment pour les élèves les plus défavorisés. Mais là encore, la solution proposée est floue. Faut-il prévoir un fichier Excel dès la petite section ? Ou une IA pour anticiper les reconversions en CM1 ?
La vérité, c’est que cette obsession pour l’orientation masque une réalité plus terre-à-terre : un désengagement de l’État sur les moyens accordés à l’école, au détriment des enseignants, des psychologues de l’éducation nationale, et des conseillers d’orientation (quand il en reste).
Une école formatée, des enfants programmés
Derrière le jargon ministériel, le message est limpide : l’enfant doit s’adapter au marché, non l’inverse. Cette approche, largement inspirée des modèles managériaux anglo-saxons, est pourtant contestée par de nombreuses recherches. Le Conseil national d’évaluation du système scolaire (CNESCO) a rappelé à plusieurs reprises que l’orientation précoce renforce les inégalités sociales, sans gain réel pour l’employabilité.
Mais dans la France post-Parcoursup, chaque élève devient une fiche métier en puissance. Le rôle de l’école n’est plus de former des citoyens éclairés, mais des candidats optimisés.
Donc , pour Borne, les élèves doivent commencer à réfléchir à leur orientation professionnelle dès la maternelle.
— Alexis Poulin (@Poulin2012) April 8, 2025
Je ne sais pas si vous réalisez le degré de déconnexion de cette troupe comique.
C’est vraiment la fin. pic.twitter.com/mI1cLtn6LQ